Mohammed Redwan Jakir - Membre de Teach For Bangladesh et jeune leader du GPE
J'enseigne dans une école publique défavorisée au Bangladesh, et je constate à quel point le changement climatique pénalise davantage les élèves les plus vulnérables pour accéder à un enseignement de qualité.
En 2024, le Bangladesh a été confronté à l’une des pires crises climatiques de son histoire récente. Des inondations dévastatrices, cyclones et vagues de chaleur extrêmes ont non seulement détruit les récoltes et les habitations, mais aussi perturbé la scolarité de millions d'enfants.
Le changement climatique est aujourd’hui plus visible que jamais, avec des températures en hausse et des vagues de chaleur plus fréquentes.
En juin, la chaleur a dépassé 42 °C dans les salles de classe, obligeant le gouvernement à fermer toutes les écoles primaires et secondaires.
Cette décision, prise pour protéger la santé des élèves, a toutefois entraîné plusieurs semaines de pertes d’apprentissage, surtout pour ceux qui n’ont pas accès à l’éducation en ligne.
En août 2024, de graves inondations ont frappé les terres basses du Bangladesh, notamment Chattogram, Feni, Cumilla et Khagrachari. De nombreuses écoles ont servi d'abris temporaires pour les victimes des inondations, interrompant les cours et endommageant les infrastructures.
Des milliers d'élèves, en particulier ceux vivant dans les régions les plus reculées, ont perdu un temps d’apprentissage précieux et se sont retrouvés sans manuels scolaires ni supports pédagogiques.
En novembre, le cyclone Remal a balayé la zone côtière, provoquant de nouveaux déplacements de familles et obligeant d'autres écoles à fermer. Ces catastrophes successives ont aggravé les inégalités existantes dans le système éducatif bangladais, en particulier pour les élèves des régions reculées ou défavorisées.
Au sein de ma communauté scolaire à Dhaka, j'ai mené des initiatives locales d'éducation au changement climatique et de sensibilisation au climat en organisant des sessions destinées aux élèves, parents et enseignants.
Mes élèves et moi avons planté des arbres, mis en place des systèmes de gestion des déchets à faible coût et organisé une foire sur le thème du climat réunissant différentes parties prenantes.
Les élèves y ont vendu leurs produits recyclés et exposé leurs peintures sur le changement climatique. L'une de nos campagnes scolaires, Green Currency (monnaie verte), a incité les élèves à recueillir les déchets plastiques auprès des membres de la communauté en échange de jeunes arbres.
En tant qu'enseignant, j'intègre les concepts liés au changement climatique dans mes cours de mathématiques et de sciences afin que les élèves puissent mettre en pratique ce qu'ils apprennent. L'objectif est de favoriser un leadership local pour inciter les élèves à devenir des agents de la résilience climatique dans leurs communautés.
Malgré l'urgence de la crise, le programme scolaire du Bangladesh intègre encore très peu l’éducation au changement climatique. Si les manuels de sciences et de géographie font parfois référence à l'environnement, il s’agit de mentions isolées qui ne débouchent pas sur des actions concrètes.
La plupart des enseignants ne sont pas formés aux questions climatiques, ayant pour conséquence des élèves mal préparés à un avenir de plus en plus instable sur le plan environnemental.
La politique nationale en matière d'éducation de 2010, qui régit actuellement le secteur de l'éducation au Bangladesh, aborde brièvement la question de la sensibilisation au climat, mais des mesures plus approfondies, structurées et orientées vers l'action sont nécessaires pour qu'une éducation au changement climatique soit mise en place dans tout le pays.
L'éducation au changement climatique doit être au cœur du processus de réforme du programme scolaire bangladais. Cela suppose d’intégrer les concepts liés au climat dans toutes les matières, de mettre l’accent sur l'apprentissage par projet et de former systématiquement les enseignants.
Le Bangladesh s'est déjà engagé dans plusieurs cadres mondiaux, notamment l'Action pour l'autonomisation climatique de la CCNUCC, la Feuille de route 2030 pour l'Éducation au développement durable de l'UNESCO et l'Article 12 de l'Accord de Paris. Ces engagements forts doivent désormais se traduire en actions concrètes sur le terrain.
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