« J’ai fait partie de la première promotion de A-level (équivalent du baccalauréat) à l’école V. Keyodhoo et j’ai eu la chance de pouvoir poursuivre ma scolarité tout en restant sur mon île natale », explique Haanee Ahmed.

Les Maldives se composent de 1 196 îles formant 26 atolls (des chaînes d’îles coraliennes entourant un lagon), une géographie qui pose de sérieux défis pour garantir l'accès à l’éducation à tous les enfants des Maldives.

Jusqu'à récemment, des élèves comme Haanee devaient aller s’installer sur une autre île, où l’enseignement du second cycle du secondaire était dispensé, pour pouvoir terminer leurs deux dernières années de scolarité (niveau clé 5, c’est-à-dire les 11^e et 12^e années de scolarité, ou le A-level).

« S’installer à Malé présente de nombreux défis », explique t elle. « Lorsque l’école de notre île a commencé à proposer les cours de A-level, j’ai pu éviter toutes ces difficultés. »

Hussain Simah est reconnaissant d’avoir pu rester sur l’île de Keyodhoo, son île natale, pour suivre les cours de A-level. « J’aurais été obligé de déménager sur une autre île et de me séparer de ma famille et de mes amis », raconte Hussain. « Cela aurait été très difficile pour moi. Avoir mes parents auprès de moi pendant que je poursuivais ma scolarité a beaucoup allégé ma charge mentale. »

Auparavant, les écoles devaient avoir au moins 10 élèves inscrits pour pouvoir proposer les classes du second cycle du secondaire. Cette politique a entraîné des disparités importantes en termes d'accès au second cycle de l’enseignement secondaire entre les différents atolls.

Sur de nombreuses petites îles, les élèves n’avaient aucune option locale, les obligeant à quitter leur environnement ou à renoncer à poursuivre leur éducation. S’installer ailleurs s’accompagnait souvent de tensions émotionnelles — tant pour les élèves que pour leurs parents — et engendrait également des coûts élevés pour les familles.

Aujourd’hui, grâce à l’utilisation efficace des données géospatiales, davantage d’élèves peuvent accéder au second cycle du secondaire plus près de chez eux.

Le potentiel des données géospatiales

En 2021, les planificateurs de l’éducation et les décideurs politiques des Maldives ont participé à une formation de cinq semaines sur l’utilisation des données géospatiales pour renforcer l’équité d’accès à l’éducation.

Cette formation, appelée Learning Cycles (Cycles d’apprentissage), est proposée par le biais du pôle régional Europe, Moyen-Orient et Afrique du Nord, Asie et Pacifique du KIX et dispensée en partenariat avec l'Institut international de planification de l’éducation (IIPE) de l’UNESCO.

La formation s’inscrit dans le cadre du soutien plus large du GPE KIX au renforcement des capacités des experts de l’éducation dans les pays partenaires de la région Europe, Moyen-Orient et Afrique du Nord, Asie et Pacifique.

Les Maldives ont été l’une des dix équipes nationales ayant participé à cette formation. Elle a permis aux participants d’appliquer des techniques de cartographie de base à l’aide de systèmes d’information géographique, de comprendre le rôle des données géospatiales dans la planification et la gestion de l’éducation et d’envisager leur utilisation pour promouvoir un accès plus équitable à l’éducation.

Le pôle KIX EMAP du GPE estime qu’il est important que la formation Learning Cycles inclue un large éventail de parties prenantes, qu’elles proviennent du monde universitaire, des pouvoirs publics ou encore de la société civile.

L’équipe des Maldives était représentative de cette diversité, réunissant des responsables de la planification du ministère de l’Éducation ainsi que des universitaires de l’université nationale des Maldives.

Le soutien du GPE aux Maldives

Ce travail du pôle KIX EMAP du GPE s’aligne avec le soutien plus large du GPE aux Maldives qui privilégie l’équité et l'inclusion et qui accorde une priorité élevée aux données et aux éléments concrets. Le GPE soutient le pays par le biais de plusieurs financements.

Les financements pour la transformation du système éducatif et pour le renforcement des capacités du système, mis en œuvre par l’UNICEF, vise à garantir un système de gestion des données plus fiable afin d’identifier les besoins des élèves, de suivre les progrès réalisés et d’évaluer l’impact.

Le financement au titre du fonds à effet multiplicateur, mis en œuvre par la Banque mondiale, fournit un financement supplémentaire visant à améliorer la prise de décision fondée sur les données probantes en renforçant les capacités du personnel éducatif et en développant un système d’information pour la gestion de l’éducation (SIGE) plus performant.

Ces financements courent jusqu’en 2028. Ils permettront également de soutenir la création d’un centre de formation dédié au renforcement des capacités du ministère de l’Éducation pour collecter et intégrer les données qui sont actuellement dispersées à travers plusieurs systèmes. Cette initiative permettra ainsi d’avoir une vision plus globale des résultats liés à l’éducation.

Au-delà du travail du GPE, des efforts complémentaires sont en cours afin de renforcer l’ensemble des écosystèmes de données pour soutenir la prise de décision et améliorer les résultats en matière d’éducation. Par exemple, Google et UNICEF collaborent pour soutenir le développement du second cycle de l’enseignement secondaire.

Des retombées positives pour les participants, mais aussi pour les enfants

À l’aide de logiciels géospatiaux, les planificateurs de l’éducation ont cartographié les densités démographiques, l’emplacement des écoles, les zones desservies par les écoles, les infrastructures de transport ainsi que d’autres facteurs essentiels pour le second cycle de l’enseignement secondaire.

En superposant ces informations, ils ont pu identifier les zones mal desservies et les cibler en priorité pour la construction de nouvelles écoles.

Ces enseignements ont directement orienté les décisions politiques.

Grâce à ces décisions, au moins une île dans chaque atoll pourra dispenser des classes du second cycle du secondaire même si l’école a moins de dix élèves inscrits au A-level.

Les données géospatiales changent des vies

Le GPE KIX travaille à garantir que les pratiques les plus innovantes et fondées sur des données probantes soient mises en œuvre par les décideurs politiques qui façonnent les politiques éducatives. Aux Maldives, le pôle KIX EMAP du GPE a facilité avec succès ce type d’intégration des données probantes.

La formation Learning Cycle sur les données géospatiales proposée par le pôle KIX EMAP du GPE est un exemple concret de cette approche.

« Learning Cycle démontre comment les données peuvent permettre de résoudre des problèmes complexes et récurrents » ajoute Mme Steiner-Khamsi. «  Cela aura un impact majeur — non seulement pour les élèves et leur avenir, mais également pour les enseignants et les parents. »

En tirant parti de la technologie, les planificateurs de l’éducation et les décideurs politiques transforment peu à peu le paysage éducatif aux Maldives, une école à la fois.

Haanee est une élève parmi tant d’autres à déjà en bénéficier. « Je viens d'être sélectionnée pour un poste au Conseil de l’île », raconte-t-elle. « J’ai obtenu cette opportunité grâce à mon diplôme de A-level. »