Nigéria : Comment les écoles répondent aux besoins des enfants réfugiés et de ceux des communautés hôtes

<p>Un programme financé par le GPE et mis en œuvre par Save the Children est en train de transformer l’éducation dans cinq États, en soutenant à la fois les élèves réfugiés et ceux des communautés hôtes.</p>

Nigéria : Comment les écoles répondent aux besoins des enfants réfugiés et de ceux des communautés hôtes

How Nigerian schools are meeting the needs of refugee and host students
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Points clés

  • Les enfants réfugiés camerounais arrivant dans les écoles au Nigéria ont été confrontés à des salles de classes surchargées, à une pénurie d’enseignants et à un manque de fournitures scolaires de base, rendant leur instruction difficile.
  • Un programme financé par le GPE et mis en œuvre par Save the Children est en train de transformer l’éducation dans cinq États, en soutenant à la fois les élèves réfugiés et ceux des communautés hôtes.
  • Ces efforts viennent soutenir la réponse plus large apportée par le ministère fédéral de l’Éducation du Nigéria à la crise de l’éducation qui touche les enfants réfugiés.
Carte du Nigéria

Cet article a été rédigé en collaboration avec Save the Children.

En seulement quelques années, l’école primaire communautaire de Ogugu, dans l’État de Benue, est passée de moins de 50 élèves à plus de 500, dont la plupart sont des réfugiés camerounais.

Cette hausse n’est pas le fruit du hasard : elle reflète un effort coordonné, mené par le gouvernement du Nigéria à travers le ministère fédéral de l’Éducation, pour répondre aux besoins éducatifs des enfants déplacés.

Grâce à un financement du GPE d’un montant de cinq millions de dollars pour la période 2024-2025, et au soutien de Save the Children pour sa mise en œuvre, le ministère est en train d’élargir l'accès à l’éducation pour 24 200 enfants réfugiés et 7 260 enfants des communautés hôtes à travers les cinq États les plus touchés par l’arrivée de réfugiés.

  • Le camp de réfugiés d'Ikyogen dans l'État de Benue au Nigéria.

  • Des élèves sur le chemin de l'école à Ikyogen dans l'État de Benue au Nigéria.

L’afflux de réfugiés met à rude épreuve les écoles dans l’est du Nigéria

Plus de sept ans après le début du conflit dans le sud-ouest du Cameroun, le flux continu de réfugiés vers le Nigéria accentue la pression sur les communautés hôtes déjà fortement sollicitées.

En juillet 2025, le HCR comptait plus de 119 000 réfugiés installés dans les États d’Akwa Ibom, d’Adamawa, de Benue, de Cross River et de Taraba.

Smile, a 14-year-old girl

Parmi eux, nous retrouvons Smile, une adolescente de 14 ans qui a fui le Cameroun avec sa mère, après avoir perdu son père dans le conflit.

Elle vit dans un camp de réfugiés situé à Ikyogen, dans l’État de Benue, et va à l’école primaire RCM Ahondo.

Comme beaucoup d’enfants réfugiés, Smile a d’abord trouvé la transition difficile.

Smile

« Quand je suis arrivée à l’école, je me sentais mal à l’aise parce que je n’avais ni d’uniforme ni de fournitures scolaires. Je ne savais pas lire un mot, contrairement à mes camarades de classe. L’école me paraissait sinistre, comme si je n’étais pas à ma place. »

Smile
Réfugiée camerounaise âgée de 14 ans
  • Smile, 14 ans participe en classe avec sourire et assurance.

  • Smile, 14 ans, et son amie Miracle, 14 ans, en route vers l’école.

L’expérience de Smile témoigne des défis généralisés : classes surchargées, pénurie d’enseignants et préoccupations liées à la protection des enfants — autant de facteurs susceptibles de freiner la scolarisation.

Drone shot of children in their school environment in Ikyogen Benue State

Une école isolée en première ligne d’une crise

À Ogugu, un village de l’État de Benue situé à trois heures de la route principale la plus proche, les conditions sont particulièrement difficiles.

Avant de bénéficier d’un soutien, l’école primaire communautaire d’Ogugu n’avait que trois salles de classe et le bureau du directeur se résumait à une simple case en terre.

Dépourvue d’accès à l’eau et de toilettes, et avec des cours dispensés à l’ombre des arbres, la situation était difficile pour les élèves comme le personnel, et de nombreux parents préféraient envoyer leurs enfants travailler plutôt qu’à l’école.

L’arrivée de familles réfugiées a poussé un système déjà fragilisé à ses limites, rendant le soutien non seulement nécessaire, mais urgent.

Reconstruire les écoles — une leçon à la fois

Les améliorations des infrastructures ont joué un rôle déterminant dans la transformation des écoles telles que l’école primaire communautaire d’Ogugu, où une structure d’apprentissage temporaire de deux salles de classe a été construite et le bâtiment d’origine rénové.

Afin de répondre à une demande croissante en matière d’éducation, huit enseignants bénévoles ont été recrutés et formés aux méthodes d’enseignement de la lecture, de l’écriture et du calcul, y compris les méthodes d’enseignement au bon niveau (TaRL), consistant à adapter les leçons au rythme de chaque enfant pour les aider à rattraper leur retard.

« La méthode TaRL a rendu l’enseignement plus facile pour les bénévoles comme pour les élèves. Certains élèves ne savaient pas reconnaître l’alphabet ou lire. Aujourd’hui, nous constatons qu’ils ont fait des progrès significatifs. »

Zachariah
Enseignant bénévole à l’école primaire communautaire d’Ogugu
  • Zachariah, un enseignant bénévole, interagit avec les élèves et dirige des activités de groupe en classe à Ikyogen.

  • Un enseignant bénévole et ses élèves en classe à l'école primaire communautaire d’Ogugu.

À ce jour, dans l’ensemble des cinq États concernés, près de 25 900 enfants ont reçu des kits d’apprentissage comprenant des cartables, du matériel d’écriture et des gourdes.

Ces petites améliorations ont permis d’augmenter le taux de scolarisation et de renforcer la participation en classe.

Plus de 5 500 élèves supplémentaires devraient recevoir des kits d’apprentissage d’ici la fin du programme financé par le GPE.

Smile

« Les kits d’apprentissage m’aident parce que j’ai tout le matériel qu’il me faut. Maintenant je peux épeler mon nom et lire des mots. J’apprends même à mes plus jeunes frères et sœurs. »

Smile
Réfugiée camerounaise âgée de 14 ans
  • Smile lit un livre issu de son kit d'apprentissage.

  • Rachael, une élève de primaire, se sert de son kit d’apprentissage.

  • Des élèves montrent les kits d’apprentissage qu’ils ont reçus.

À Ogugu, le programme du GPE a permis d’établir un comité de gestion scolaire et de relancer l’association des parents d'élèves, favorisant une appropriation à l’échelle de la communauté ainsi qu’un soutien à long terme en faveur de l’éducation.

La formation à la sécurité destinée aux responsables scolaires et communautaires a également conduit à l’élaboration de nouveaux plans de sécurité et de prévention de la violence, visant à protéger les élèves tant à l’école qu’au sein de la communauté.

Smile, 14, with her dignity kit, Ikyogen, Benue.

Le programme s’attaque également à l’un des obstacles les moins visibles à l’éducation des filles : l'hygiène menstruelle.

Dans de nombreux contextes touchés par la crise, la stigmatisation et le manque de ressources obligent les filles à manquer l’école plusieurs jours par mois.

Pour remédier à cela, 4 500 filles bénéficient de kits de dignité contenant des serviettes hygiéniques, des sous-vêtements, du savon et des informations sur l'hygiène menstruelle.

Jusqu’ici, 3 200 filles, dont Smile, ont reçu ces kits et ont été formées à les utiliser en toute sécurité et avec confiance.

  • Smile, 14 ans, et son amie Miracle, 14 ans, brandissent des articles de leurs kits de dignité.

  • Des élèves montrent les kits de dignité qu'elles ont reçus.

Smile, 14-year-old Cameroonian refugee

« Avant, j’évitais de me lever en classe parce que mes camarades se moquaient de moi si mes habits été tachés. Les kits de dignité m’aident à me sentir plus à l’aise. Maintenant, je ne manque plus l’école lorsque j’ai mes règles. »

Smile
Réfugiée camerounaise âgée de 14 ans
Righteous, Smile’s mother

« Cela a atténué un peu la pression qui pesait sur moi. J’essaie de gérer au mieux le peu de moyens que j’ai pour subvenir aux besoins de Smile et de ma famille, et cela n’est souvent pas suffisant. Maintenant, elle dispose du matériel dont elle a besoin. »

Righteous
Mère de Smile

Quand le soutien révèle le potentiel

L’impact du programme financé par le GPE est évident : le taux de scolarisation a augmenté, l'absentéisme est en baisse et les élèves, y compris les enfants réfugiés, sont plus impliqués.

La formation des enseignants a transformé l’environnement d’apprentissage en classe grâce à des méthodes participatives et à de meilleurs outils pédagogiques.

Le programme a également favorisé l’intégration et l’inclusion des enfants réfugiés, leur permettant de devenir des membres actifs de la communauté scolaire.

« Avant, ils se sentaient parfois perdus et exclus. Aujourd’hui, grâce à l’accompagnement et au soutien qu’ils reçoivent, nous constatons un changement significatif dans leur comportement et leur apprentissage. »

Zachariah
Enseignant bénévole à l’école primaire communautaire d’Ogugu
Principal, Ugugu Community Primary School, Benue

« Les élèves réfugiés arrivent à l’école prêts à apprendre, sachant qu’ils ont une place ici. »

Directeur
École primaire communautaire d’Ogugu
  • Un élève résout un problème au tableau à l’école primaire communautaire d’Ogugu.

  • Des élèves participe à un exercice pratique à l’école primaire communautaire d’Ogugu.

Malgré ces progrès, des défis persistent, notamment le déséquilibre entre le nombre d’élèves et celui des enseignants.

Grâce à la mobilisation continue des responsables communautaires, des efforts sont en cours pour intégrer les enseignants bénévoles à la fonction publique afin d’assurer un soutien durable.

Save the Children, en partenariat avec le Teachers Registration Council of Nigeria (Conseil des enseignants du Nigéria), a facilité l’inscription de 118 enseignants bénévoles, y compris des enseignants qualifiés, afin qu’ils obtiennent leur certification professionnelle.

Cette initiative reconnaît non seulement leur travail acharné, mais elle a également un impact direct et durable sur la qualité de l’éducation des élèves en professionnalisant le corps enseignant.

RÉSULTATS À CE JOUR

  • 4 447 enfants réfugiés et des communautés hôtes ont été réintégrés dans le système éducatif.
  • 25 869 enfants ont reçu des kits d’apprentissage, dont plus de 5 591 distribués en 2025.
  • 3 195 filles ont bénéficié de kits de dignité, dont plus de 1 305 distribués en 2025.
  • 542 enseignants ont été formés aux méthodes d’enseignement au bon niveau (TaRL).

Le soutien collaboratif est en passe de transformer l’éducation

Le ministère fédéral de l’Éducation du Nigéria reconnaît que l’avenir des enfants réfugiés et celui des enfants des communautés hôtes sont étroitement liés.

Le gouvernement nigérian a pris l’initiative de promouvoir une approche collective en faveur d’une éducation sûre, inclusive et de qualité.

En collaboration avec le State Agency for Mass Education (l’agence nationale pour l’éducation de masse), le State Universal Basic Education Board (Conseil national pour l’éducation de base universelle) et Save the Children, le ministère de l’Éducation a permis à plus de 4 400 élèves réfugiés et des communautés hôtes de passer les examens officiels dans le cadre d’un programme d’apprentissage accéléré.

Cet effort conjoint a également conduit à l’élaboration d’une stratégie unifiée et d’un plan de travail détaillé, ouvrant la voie à la transition de ces enfants vers l’enseignement formel.

GPE letters

Grâce au financement du GPE, incluant le soutien apporté par le biais de financements accélérés et de financements au titre du fonds à effet multiplicateur, le Nigéria est en mesure de répondre aux besoins immédiats des enfants.

Cela permet également au pays de poser les bases d’un système éducatif plus robuste et plus inclusif, à même de mieux soutenir les enfants réfugiés et ceux des communautés hôtes, aujourd’hui et dans les années à venir.

Crédits photos : Pem Musa/Save the Children.

Septembre 2025