Pakistan : l’éducation de 300 filles rendue possible à Mansehra grâce à l’engagement de la communauté locale

Dans le village de Chamhora, dans le district de Mansehra, au Pakistan, une nouvelle école primaire va ouvrir ses portes, marquant ainsi une étape importante qui permettra à 300 filles issues de milieux défavorisés d’accéder à l’éducation. Ce succès est d'autant plus remarquable qu'il a été réalisé grâce aux efforts de la communauté locale, démontrant ainsi le pouvoir du changement à l’échelle locale.

21 juillet 2025 par Qaiser Munir, Reframing Education Accountability in Pakistan - REAP, et Dipa Dahal, Education Out Loud
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Bientôt, les filles vivant à Chamhora au Pakistan auront leur propre école. Crédit : CSEN

Bientôt, les filles vivant à Chamhora au Pakistan auront leur propre école.

Credit: CSEN

À Chamhora, les jeunes filles rêvaient d’aller à l’école, mais elles étaient confrontées à une dure réalité. Malgré une population de plus de 8 000 habitants, il n’y avait aucune école primaire pour filles à proximité.

Alors que les filles plus âgées pouvaient parcourir des trajets plus longs pour aller à l’école, environ 300 filles de 5 à 10 ans se trouvaient privées d’acces à l’enseignement primaire, ce qui a entraîné d’importants retards scolaires à un stade critique de leur développement.

« Il y avait une jeune fille de Chamhora qui venait souvent chez moi. Elle regardait ma fille faire ses devoirs avec beaucoup d’intérêt. Cela me rendait triste de savoir qu’elle ne pouvait pas aller à l’école. »

Ms. Shumaila
Membre du Réseau de la société civile pour l’éducation

La société civile s’engage

La situation aurait pu ne pas évoluer pour ces jeunes filles, mais grâce au soutien de L’Éducation à voix haute, la société civile est intervenue pour transformer les préoccupations de la communauté en action collective.

Dirigé par l’Institut des sciences politiques et sociales (I-SAPS) et la Commission des droits des consommateurs du Pakistan, le projet « Reframing Education Accountability in Pakistan » (Repenser la responsabilité en matière d’éducation au Pakistan, REAP) donne aux groupes de la société civile les moyens de collaborer plus efficacement avec le gouvernement, d’influencer les politiques en matière d’éducation et d’améliorer la prestation de services grâce à un dialogue fondé sur des données factuelles et à une responsabilisation renforcée.

Le REAP favorise également la création d’espaces collaboratifs où les responsables du gouvernement respectent et écoutent les contributions de la communauté.

Qaiser Munir

« Traditionnellement, la création d’écoles publiques dépendait fortement des priorités du gouvernement, des processus de planification complexes et de la disponibilité des fonds, avec peu ou pas de participation communautaire. Les communautés ne connaissent souvent pas les voies appropriées pour dialoguer avec les fonctionnaires ou trouvent que le gouvernement est peu disposé à résoudre leurs problèmes. »

Qaiser Munir
Directeur technique à l’Institut pakistanais de recherche politique, Institut des sciences sociales et politiques

Grâce au réseau d’éducation de la société civile (CSEN), un réseau créé dans le cadre du projet REAP qui rassemble des groupes locaux de la société civile, des dirigeants et des représentants communautaires, les habitants de Chamhora ont pu être accompagnés quant aux procédures à suivre pour que leur demande d’école soit entendue.

« La réaction de la communauté a été incroyable. Les parents étaient prêts à frapper à toutes les portes pour que cette école voie le jour », raconte Mme Shumaila.

« Ensemble on va plus loin... »

Selon Ishtiaq Ahmad Khan, membre et coordinateur du CSEN, rassembler la communauté n’a pas été facile. Au début, les gens étaient méfiants. Certains pensaient que cela ne fonctionnerait pas et d’autres essayaient simplement de survivre.

« Mais une fois que nous avons tous parlé d’une seule voix, notre message est devenu puissant. L’approbation pour l’ouverture de l’école prouve que lorsque nous sommes unis, même les défis les plus complexes peuvent être surmontés », dit-il.

Grâce aux conseils stratégiques et au soutien technique de l’Institut des sciences politiques et sociales, les membres du CSEN et des bénévoles de la communauté ont fait du porte-à-porte pour recueillir des données sur les familles, notamment le nombre de filles en âge d’aller à l’école, y compris celles qui étaient inscrites dans des écoles éloignées et celles qui ne pouvaient pas aller à l’école en raison de la distance ou de difficultés financières.

Les données ont montré que plus de 300 filles n’étaient pas scolarisées, ce qui a fourni à la communauté des arguments solides pour changer les choses.

Le réseau de la société civile pour l’éducation a facilité l’organisation de réunions communautaires afin de rédiger un ensemble de revendications communes et a activement mobilisé les dirigeants locaux, les élus et les responsables de l’éducation afin de rallier un large soutien.

Avec les données à disposition et le soutien de la communauté au sens large, ils ont déposé une demande officielle pour la création d’une nouvelle école et ont maintenu cette dynamique grâce à des suivis réguliers, des réunions de plaidoyer et un dialogue avec les responsables gouvernementaux.

« Je me souviens encore de notre première rencontre : incertaine, mais pleine d’espoir. Aujourd’hui, je suis extrêmement fier d’avoir obtenu l’accord officiel pour l’école. Nos filles vont enfin avoir leur propre école. »

Muhammad Ayub
Un aîné de la communauté et défenseur de l’éducation des filles à Chamhora

Une grande victoire pour la société civile

Le gouvernement a donné son accord pour la création de la nouvelle école, confirme Arifa Khan, responsable de l’éducation pour le sous-district de Mansehra : « Poussés par les sollicitations de la communauté, nous avons approuvé le projet d’école et sommes en train de terminer toutes les formalités, y compris la mise en conformité avec les exigences légales et administratives pour sa création. »

Avec la construction d’une école locale, environ 300 filles qui n’ont jamais été scolarisées auront bientôt accès à l’enseignement primaire dans leur village.

Qaiser Munir estime que l’impact sera transformateur et remercie la communauté et le CSEN pour avoir favorisé cette avancée grâce à des données précieuses, à leur persévérance et à leur unité.

« Et ce n’est que le début », déclare Ishtiaq Ahmad Khan. « Nous devons rester impliqués pour faire en sorte que cette école puisse répondre à tous les besoins de nos enfants. »

Leur stratégie : une approche étape par étape

Dans le cadre du projet REAP soutenu par L’Éducation à voix haute, l’Institut des sciences politiques et sociales a mis en place le réseau de la société civile pour l’éducation (CSEN) dans tout le Pakistan afin de renforcer le plaidoyer au niveau local et de promouvoir l’engagement dans le domaine de l’éducation.

À Chamhora, le CSEN a pris les mesures suivantes pour concrétiser la création d’une nouvelle école :

  • La mobilisation communautaire a permis d’obtenir le soutien indispensable des autorités locales. Il s’agissait de réunir les dirigeants communautaires afin de mettre en évidence le problème et d’élaborer un ensemble de revendications communes à présenter aux autorités éducatives du district, en impliquant le président du conseil du village dans les réunions au niveau du district.
  • Des alliances stratégiques entre les membres de la communauté, les dirigeants locaux et les autorités éducatives du district ont été nouées afin d’obtenir le soutien de la communauté pour une demande officielle, étayée par des données, qui a ensuite été soumise aux responsables éducatifs du district. Des réunions de suivi régulières avec les acteurs de la société civile, les bénéficiaires potentiels et les parents ont permis de maintenir la dynamique et l’unité.
  • Un plaidoyer fondé sur des données, en exploitant celles-ci à chaque étape du processus, a permis de démontrer le potentiel transformateur d’une approche éclairée et documentée pour relever les défis complexes du secteur de l’éducation. La présentation transparente des données aux membres de la communauté les a également aidés à saisir l’importance de la question, favorisant ainsi un sentiment collectif d’urgence et d’engagement à trouver des solutions.
  • Un engagement constant à travers un dialogue régulier avec les responsables éducatifs du district a permis de garantir la poursuite des efforts en faveur de la création d’une nouvelle école, en accord avec les cycles de planification éducative du district. Cet engagement a permis de maintenir la question au premier plan et a finalement conduit à l’obtention de l’accord.

Perspectives d’avenir

L’approbation de la nouvelle école marque une étape importante pour Chamhora, mais le chemin est encore long.

Le financement étant assuré et les formalités en cours, les responsables gouvernementaux travaillent avec la communauté pour trouver un site de construction sûr dans cette zone du village exposée aux tremblements de terre.

Une fois cette étape franchie, la construction pourra commencer, permettant ainsi à 300 filles d’accéder à l’éducation à laquelle elles ont droit et réaffirmant le pouvoir du changement mené par la communauté.

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