Syrie : une rentrée scolaire pas comme les autres
Points clés
- En Syrie, 14 années de conflit ont fortement limité l’accès des enfants à une éducation de qualité. Depuis 2020, le soutien du GPE a toutefois permis à des milliers d’entre eux d’apprendre dans des environnements sûrs.
- Des parcours éducatifs non formels ont permis à des enfants non scolarisés de retrouver le chemin des salles de classe, leur permettant ainsi de rattraper leur retard scolaire et d'acquérir les compétences nécessaires pour repasser à une éducation formelle.
- Alors que la Syrie traverse actuellement une période de transition, la rentrée scolaire est bien plus qu'une simple étape académique : elle marque un engagement en faveur de la paix, de la résilience et de l'avenir des enfants.
Cet article a été rédigé en collaboration avec Save the Children et UNICEF Syrie.
Dans un camp de déplacés à Ar-Raqqa, en Syrie, Sarah*, 10 ans, franchit chaque matin les portes de son école le sourire aux lèvres et avec le rêve de devenir enseignante. À près de 300 kilomètres de là, à Lattaquié, en Syrie, Hayat, 13 ans, serre ses cahiers contre elle, bien décidée à devenir pédiatre.
Malgré la distance qui les sépare, ces deux filles ont un parcours commun : elles ont toutes deux été privées d'éducation.
Aujourd'hui, grâce au GPE, à Save the Children, à l'UNICEF et à de nombreux autres partenaires, elles font partie des plus de 15 000 enfants qui ont rattrapé leur retard scolaire dans des classes sûres et non formelles et ont pu faire la transition vers l'éducation formelle, preuve qu'en lui offrant une seconde chance, on peut réécrire l'avenir d'un enfant.
« L'école, c'est ma vie » : le parcours de Sarah pour retrouver le chemin de l'école
En raison du conflit en Syrie, Sarah, 10 ans, a subi des déplacements répétés pendant la majeure partie de sa vie.
Sa famille composée de sept personnes s'est finalement installée dans un camp informel dans le nord-est du pays, sans une école à proximité.
« Avant de commencer à aller à l'école, je ne savais rien. J'étais triste et je m'asseyais souvent dehors pour regarder mes amis eux aller à l'école », se souvient-elle.
Tout a changé lorsque sa famille a reçu la visite du personnel travaillant dans l'espace d'apprentissage temporaire voisin, géré par Save the Children et financé par le GPE.
Ils ont parlé à ses parents d'un programme d'éducation accélérée destiné aux enfants non scolarisés.
Ce programme a pour but de les aider à acquérir des compétences de base et de la vie courante ainsi qu’à se préparer à la scolarité formelle.
Sarah et ses frères et sœurs ont immédiatement été scolarisés et ont reçu des cartables.

« J'ai aimé ma salle de classe, apprendre, les enseignants et jouer. L'école est grande, spacieuse et sûre. »
Grâce à ce programme, Sarah a appris à lire et à écrire, et a terminé sa troisième année dans cet espace d'apprentissage temporaire avant de rejoindre une école classique pour sa 4e année.
Afin de faciliter sa transition vers le système scolaire traditionnel, Sarah fait partie des 1 500 élèves qui ont reçu un kit scolaire sur mesure, adapté à leur âge et à leur niveau scolaire, comprenant des fournitures scolaires, des cahiers, des outils mathématiques et une gourde en aluminium, autant d'articles qui contribuent à réduire les obstacles économiques pour leurs familles.
La mère de Sarah, Rim*, témoigne de ce que signifie la possibilité d'aller à l'école pour sa fille :

« L'éducation apporte à ma fille une tranquillité d'esprit et l'aide à devenir un membre actif de la communauté. L'école l'aide à faire face aux pressions de la vie et la protège des difficultés auxquelles nous avons été confrontés. »
L'impact a été transformateur, non seulement pour les enfants, mais aussi pour leurs familles.
Sarah reconnaît le pouvoir de l'éducation et souhaite que tous les enfants aient la chance d'apprendre.

« Plus tard, j'espère devenir enseignante pour apprendre aux enfants à lire et à écrire, dit-elle. Je souhaite que les enfants qui ne vont pas à l'école y retournent, afin qu'aucun d'entre eux ne soit privé d'éducation. »
L’éducation pour soutenir la reconstruction
Depuis 2020, le GPE a octroyé plus de 46 millions de dollars de financements pour soutenir l'éducation des enfants en Syrie, en collaboration avec ses partenaires.
Cet appui a permis notamment de créer des environnements d'apprentissage sûrs, d'améliorer les infrastructures et de renforcer la mobilisation des communautés.
Le GPE a également joué un rôle clé dans le renforcement de la coordination sectorielle, en aidant ses partenaires à harmoniser leurs efforts afin d'apporter une réponse plus efficace et plus résiliente en matière d'éducation.
En collaboration avec l'UNICEF et Save the Children, le GPE a soutenu les enfants non scolarisés et ceux à risque d'abandon scolaire grâce à des parcours éducatifs non formels.
Permettre aux enfants de réussir pleinement
Derrière la transformation de Sarah se trouve une équipe d'éducateurs dévoués, comme Manal*, une animatrice pédagogique qui compte cinq ans d'expérience.
Manal aide les enfants comme Sarah à rattraper le retard scolaire accumulé en raison des déplacements, de la pauvreté et des crises.
Formée à la gestion de classe, à l'apprentissage inclusif, à l'apprentissage socio-émotionnel et à la protection de l'enfance, elle adapte ses cours aux besoins individuels de chaque enfant.
« La plupart des enfants ici sont déplacés, ont connu la guerre et en ont souffert. Ils ont vécu des conditions très difficiles. Nous faisons de notre mieux pour nous rapprocher d'eux, les aider et créer un environnement sûr et agréable où ils peuvent se sentir à l'aise », explique-t-elle.
Manal estime que l'éducation est la clé d'un avenir meilleur, non seulement pour chaque enfant, mais aussi pour l’ensemble de la société syrienne.

« Notre objectif est d’aider les enfants à surmonter leurs difficultés et à diminuer leur stress en réduisant leur appréhension à interagir avec les autres. Ils développent davantage de liens avec leur famille et leur entourage, et s’intègrent plus facilement dans leur communauté. Une fois scolarisés dans une école formelle, ils sont plus impliqués. »
Manal joue un rôle important dans les campagnes de scolarisation des enfants. Elle distribue des brochures et rend visite aux familles dans les camps informels et les zones résidentielles.
Elle explique qu'il existe des parcours éducatifs non formels pour leurs enfants, où ils apprennent des compétences essentielles et qui leur permettent d'accéder à l'éducation formelle.

« Les programmes du GPE sont essentiels pour l'avenir des enfants syriens jusque-là non scolarisés, afin qu'ils puissent accéder à une éducation inclusive et de qualité, passer les examens nationaux, obtenir des certifications et poursuivre leur apprentissage. »
« Je rêve de devenir pédiatre » : le parcours scolaire de Hayat
Hayat et sa famille, originaires de Lattaquié, dans l'ouest de la Syrie, ont été déplacées à cause du conflit, et elle a dû interrompre sa scolarité à la 5e année. Pourtant, elle n'a jamais cessé de chercher à apprendre.
« Ma mère a fait des études, dit-elle fièrement, et elle m'enseignait à la maison, me rappelant que je devais être prête à retourner à l'école à tout moment. »
Lorsqu'une équipe de sensibilisation de l'UNICEF a parlé à sa famille d'un centre d'éducation non formelle situé à proximité, Hayat était ravie de retourner à l'école.
Les cours qu’elle a reçu dans ce centre, financé par le GPE et géré par l'UNICEF, lui ont permis de rattraper son retard scolaire et à reprendre confiance en elle.

« J’aime le centre parce qu'il accorde autant d'importance au soutien émotionnel qu'à l'éducation. Si vous avez un problème à la maison et que vous vous sentez incapable de continuer, ils font tout pour vous aider. »
Fatima, l'une des enseignantes de Hayat, sait que la vie n'a pas été facile pour ses élèves.
Leur détermination à apprendre est une grande source de motivation pour elle : « Malgré toutes les difficultés, ils assistent aux cours, sont toujours à l'heure, et font face à toutes les pressions pour progresser dans leur scolarité et passer en 9e année. »
Cette année, Hayat est entrée en 9e année et fréquente une école formelle. Elle a franchi un pas de plus vers la réalisation de son rêve de devenir pédiatre.
Une nouvelle année scolaire synonyme d’espoir et opportunités
Le conflit prolongé en Syrie a engendré un ensemble complexe de défis humanitaires, économiques et sociaux.
Des millions d'enfants ont été victimes de violences, déplacés et traumatisés. L'économie a été anéantie : 90 % des Syriens vivent dans la pauvreté, le chômage est généralisé et la flambée des prix alimentaires a plongé 9,3 millions de personnes dans l'insécurité alimentaire.
Ces facteurs constituent autant d'obstacles majeurs pour les enfants qui souhaitent accéder à un enseignement sûr et de qualité et se reconstruire un avenir.
Mais un changement se profile. La récente transition du pays vers un nouveau gouvernement ouvre de nouvelles perspectives d'engagement et de réforme.
Les priorités politiques évoluant, un mouvement s'est mis en place pour ramener les enfants dans les salles de classe, mais aussi pour leur redonner espoir.
Cette année, la rentrée scolaire est synonyme d'un engagement renouvelé en faveur de l'éducation, pierre angulaire de la reconstruction de la Syrie.

« Pour la première fois après 14 ans de conflit, les enfants démarrant une nouvelle année scolaire représentent un puissant symbole d'espoir et de reconstruction. Avec le soutien du Partenariat mondial pour l'éducation, l'UNICEF et ses partenaires contribuent à donner tout son sens à cette étape importante en venant en aide aux enfants les plus vulnérables. Il ne s'agit pas seulement de ramener les enfants sur les bancs de l'école, mais aussi de rétablir le droit de chaque enfant à l'éducation, de renforcer la cohésion sociale et de jeter les bases d'une Syrie plus pacifique et plus prospère. »
Pour les familles et les enseignants, la nouvelle année scolaire est plus qu'une étape académique importante, c'est un engagement en faveur de la paix, de la résilience et de l'avenir des enfants syriens.
Chiffres clés
- Plus de 178 000 enfants inscrits dans des parcours d'éducation non formelle.
- Près de 65 100 enfants en situation de handicap ont bénéficié d'un soutien leur permettant d’accéder à l'éducation.
- Plus de 19 814 enseignants ont été formés à la pédagogie, au soutien psychosocial et à la protection de l'enfance.
- Au lendemain du tremblement de terre dévastateur qui a frappé la Syrie en 2023, un soutien ciblé a permis à plus de 94 500 enfants de participer à des services d'éducation non formelle, 96 % d'entre eux affichant une amélioration de leurs compétences en lecture et en mathématiques.
- Plus de 2 930 enfants ont été inscrits dans des programmes d'éducation de la petite enfance.
« Le GPE s'est concentré sur l'aide d'urgence aux enfants touchés par les conflits, les déplacements et les crises. Cela a permis la création d'espaces d'apprentissage sûrs, la formation d'enseignants et l'aide aux enfants pour rattraper leur retard scolaire. À l'avenir, le GPE aura l'occasion de jouer un rôle essentiel au développement de la Syrie en collaborant avec le ministère de l'Éducation pour faire progresser les priorités en matière d'éducation. C'est un moment crucial pour façonner un avenir meilleur pour les enfants syriens. »
L'éducation multiplie les possibles : elle permet non seulement aux enfants d'acquérir des compétences en lecture, en écriture et en calcul, mais aussi de développer des compétences nécessaires à la vie courante, la résilience et l'espoir.
En maintenant les enfants dans une dynamique d'apprentissage, elle les protège des risques liés au travail des enfants, aux mariages précoces et à l'exploitation, tout en leur ouvrant la voie vers des études supérieures, un emploi et la participation à la reconstruction de leurs communautés.
Grâce à un soutien mondial continu, davantage d'enfants en Syrie pourront retrouver leur droit à l'éducation.
*Les noms ont été modifiés.
Bien qu'elle ne soit pas un pays partenaire du GPE, la Syrie a reçu une aide humanitaire grâce à une autorisation exceptionnelle du Conseil d’administration du GPE.
Septembre 2025